Un siecle apres...
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UN SIÈCLE APRÈS...
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Un siècle après...
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Un siècle après...
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Il y a exactement un siècle, le 28 septembre 1864, des prolétaires de la plupart des pays d'Europe s'unissaient pour fonder l'Association internationale des travailleurs. Seize ans plus tôt, la Ligue des Communistes, société ouvrière internationale clandestine, avait publié le Manifeste du Parti communiste, demandé à Karl Marx et Friedrich Engels, qui exposait pour la première fois les principes du socialisme scientifique. La I° Internationale qui «avait pour but de fondre en une immense armée toute la classe ouvrière d'Europe et d'Amérique capable d'entrer dans la lutte», «ne pouvait pas partir des principes posés dans le Manifeste» (En gels). Le mouvement ouvrier n'en était qu'à ses premiers pas: en Angleterre dominaient les Trade-unions, associations purement économiques; en France, en Belgique, en Italie, en Espagne était encore à l'honneur le socialisme conservateur ou bourgeois de Proudhon, dont le Manifeste dit qu'il voulait «les conditions de la société moderne sans les luttes et les dangers qui en découlent fatalement», «la société actuelle, mais expurgée des éléments qui la révolutionnent et la dissolvent», «la bourgeoisie sans le prolétariat», et qu'il tenait tout entier «dans cette affirmation que les bourgeois sont des bourgeois - dans l'intérêt de la classe ouvrière»; en Allemagne, c'était le lassallisme qui dominait, un courant qui empruntait au socialisme scientifique des bribes déformées de sa doctrine, pratiquait à la fois le culte de la personnalité de son chef et l'opportunisme politique et, par dessus tout, manifestait un respect superstitieux de l'État. La victoire des propositions énoncées dans le Manifeste ne pouvait dans ces conditions être que le point d'arrivée de l'action et de la discussion communes. (Engels) et non le point de départ. «Les événements et les vicissitudes de la lutte contre le Capital ne pouvaient manquer de faire sentir aux combattants l'insuffisance de toutes leurs panacées et les amener à comprendre à fond les conditions véritables de l'émancipation ouvrière»; en d'autres termes l'adhésion du mouvement ouvrier aux positions anticipées par la petite minorité communiste ne pouvait être que le résultat de l'expérience et de la lutte: voilà comment s'explique la participation des fondateurs du socialisme scientifique à une organisation qui groupait à la fois partis et syndicats marxistes et non marxistes, chose devenue par la suite impossible. Cette attitude était juste. «La classe ouvrière de 1874, après la dissolution de l'Internationale, était tout autre que celle de 1864 au moment de sa fondation: le proudhonisme des pays latins et le lassallisme proprement dit en Allemagne étaient à l'agonie, même si les Trade-Unions restaient ultra-conservatrices. Dès 1887, le socialisme continental s'identifiât presque entièrement avec la théorie formulée dans le Manifeste» (Engels). Quelle était donc cette théorie et quels étaient ces principes dont Marx et Engels considéraient que la diffusion dans le mouvement ouvrier était la mesure exacte du degré de constitution du prolétariat en classe indépendante?

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Un siècle après, la question peut paraître superflue, étonnante, voire sacrilège. En un siècle, cette théorie et ces principes n'ont-ils pas eu tout le temps de se répandre et de triompher dans le mouvement ouvrier? Ne sont-ils pas devenus familiers à des millions d'hommes et n'est-ce pas eux qui inspirent les innombrables partis «socialistes» et «communistes» du monde? Nous disons résolument non! Nous affirmons résolument qu'aujourd'hui, tout «partis de masse» que se vantent d'être la plupart des partis «socialistes» et «communistes» du monde, rien n'est plus ignoré, méconnu ou bafoué que les principes du premier Manifeste communiste que Marx et Engels défendirent pendant neuf ans contre le «socialisme libertaire» de Bakounine jusqu'à ce que la lutte menée par ce courant contre le socialisme scientifique au sein de la I° Internationale ait paralysé celle-ci au point que la seule chose à faire était de la dissoudre en attendant la reprise du mouvement sur une base marxiste et en même temps géographiquement infiniment plus large.

La preuve? En 1890, Engels pouvait écrire que l'alliance éternelle établie par la I° internationale entre les prolétaires de tous les pays existait encore et était plus puissante que jamais. Pouvons-nous le dire aujourd'hui? Non. Non seulement les déchirements, les oppositions, les conflits nationaux et même raciaux provoqués au sein de la classe ouvrière mondiale par les deux guerres impérialistes et d'innombrables guerres coloniales sont loin d'être surmontés, mais on assiste à ce spectacle curieux que les «communistes» d'aujourd'hui, divisés sur tant de choses, sont au moins unanimes à affirmer que personne parmi eux ne souhaite «la création d'une nouvelle organisation internationale centralisée». C'est ce qui ressort du honteux épisode du «testament Togliatti» qui affirme bien haut entre autres choses que les «communistes» italiens «s'opposeraient a toute idée de créer une nouvelle organisation internationale centralisée» (eux qui se sont on ne petit mieux accommodés de la centralisation internationale du mouvement communiste sous la férule stalinienne) et que les «communistes» français ont bien honte de publier intégralement, mais nullement honte d'approuver précisément sur ce point crucial, afin de «rassurer» les italiens sur l'inexistence d'un «danger» quelconque que renaisse une forme quelconque d' Internationale centralisée. Le prétexte sous-entendu est évidemment de bannir toute possibilité de retour des «horreurs du despotisme stalinien», mais il ne tient pas debout. La centralisation peut servir le prolétariat OU la bourgeoisie; la révolution OU la conservation sociale, tout comme la violence; pas plus que la violence, elle n'est par elle-même prolétarienne et révolutionnaire ou au contraire bourgeoise et conservatrice; tout dépend du sens dans lequel elle s'exerce, des finalités qu'elle poursuit. Rejeter centralisation et violence sous le prétexte qu'elles peuvent servir l'ennemi revient à renoncer à l'avance à le combattre; mais par ailleurs comment croire que pour la génération qui s'est déshonorée par trente ans d'adulation servile à Staline, de silence complice, de tournants militairement exécutés, le «stalinisme» soit vraiment l'ennemi? La réalité est bien différente du prétexte: la réalité est que des «socialismes» nationaux arrivés à leur plein développement nationaliste ne peuvent pas coexister dans une «organisation internationale centralisée» pour la bonne raison qu'ils ne peuvent considérer aucun principe comme supérieur à leurs propres exigences nationales qui, par nature, sont décentralisatrices parce qu'elles sont fatalement en conflit ouvert ou latent avec celles du voisin, fut-il un parti frère. D'ailleurs, comment «l'organisation internationale centralisée» ne ferait-elle pas horreur aux partis d'un «mouvement» international groupant également des États dont les rivalités et les luttes (qui font pendant à celles des États qui, eux, ne se prétendent pas socialistes et sont des impérialismes non déguisés) ont forcé même feu Togliatti à reconnaître «les tendances centrifuges» et le «nationalisme renaissant»? Dans ces conditions, centralisation ne peut signifier discipline à l'égard d'un programme objectivement commun, mais seulement subordination d'un État à un autre, et de tels ou tels partis nationaux à telle ou telle puissance d'État, chose à la longue impossible, même pour des gens unis dans une haine commune de la «révolution violente», dès lors qu'ils n'ont d'autre choix que de «devenir une force influente dans la vie nationale» ou de disparaître. «L'organisation internationale centralisée», seul le prolétariat révolutionnaire peut à la fois la souhaiter et la faire vivre, parce qu'il est la seule classe qui possède un principe centralisateur à l'échelle internationale, qui est son aspiration à la révolution et à la société sans classe. Quand il n'existe ni Internationale, ni tendance à la constituer, mais tout au contraire la phobie de l'Internationale excluant toutes les «autonomies» nationales, le prolétariat est absent comme force politique, ce qui revient à dire que les principes du premier Manifeste du Parti communiste ont été foulés aux pieds, qu'ils ont été repoussés par des «principes» étrangers et que la tâche urgente est de les restaurer. Il ne servirait à rien d'objecter que le 7 septembre «les dirigeants socialistes de quarante-neuf pays d'Europe, d'Asie et des deux Amériques représentant douze millions d'adhérents» se sont bien réunis à Bruxelles pour célébrer l'anniversaire de la fondation de la I° Internationale. Le fait est une preuve supplémentaire de l'oubli profond dans lequel cette Internationale et ses principes sont aujourd'hui tombés. Autrement, comment un Clément Attice, un Guy Mollet, un Gaston Defferre, un Willy Brandt, un Victor Larock, tous hommes d'État et administrateurs confirmés de l'État bourgeois d'Angleterre, de France, d'Allemagne, de Belgique auraient-ils eu le front de revendiquer une filiation à l'égard de l'Internationale de Marx et d'Engels, de l'Internationale qui eut l'audace de revendiquer hautement la violence révolutionnaire de la Commune, ses atteintes «sacrilèges» au sacro-saint principe du suffrage universel et de la légalité, et d'en tirer cet enseignement qui fait horreur à tous les réformistes «La classe ouvrière ne peut pas se contenter de prendre telle quelle la machine d'État et de la faire fonctionner pour son propre compte elle doit la détruire !».

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Le Manifeste communiste, plate-forme sur laquelle Marx et Engels luttèrent au sein de la I° Internationale, proclamait la disparition inévitable du régime bourgeois fondé sur le salariat, décrivant ainsi le cycle capitaliste:

«La bourgeoisie ne peut exister sans révolutionner constamment les instruments de production... c'est-à-dire tous les rapports sociaux... Ce bouleversement continuel de la production, ce constant ébranlement de tout le système social, cette agitation et cette insécurité perpétuelles distinguent l'époque bourgeoise de toutes les précédentes».

Que disent aujourd'hui socialistes et communistes? Que les crises, que les guerres sont évitables, que la «révolution constante des instruments de production» est l'arme essentielle du Progrès social, que les réformes peuvent bannir et ont déjà banni «l'insécurité perpétuelle» et que la Bombe atomique est une garantie du maintien de la paix. Quand, comme actuellement en France, on licencie des ouvriers ou on diminue leurs salaires, la faute n'en revient pas au capitalisme. mais... à De Gaulle et son régime.

«Par l'exploitation du marché mondial, la bourgeoisie donne un caractère cosmopolite à la production et à la consommation. Au désespoir des réactionnaires, elle a enlevé à l'industrie sa base nationale.»

Aujourd'hui les réactionnaires qui déplorent la disparition de la base nationale de l'industrie s'intitulent «communistes». Dans son «testament», Togliatti déplorait «le processus de nouvelle concentration monopoliste dont le Marché Commun est le lieu et l'instrument» et qui constitue la base objective de la «liquidation des libertés démocratiques», de la «création de régimes autoritaires». du fait que «toute avancée de la classe ouvrière est empêchée», et de «la réduction sensible du niveau de vie». Cela ne signifie évidemment pas qu'à un stade moins poussé de concentration internationale, le capitalisme assurait une tâche idyllique à la société, mais simplement que les réactionnaires de l'espèce Togliatti redoutent les conséquences révolutionnaires de cette nouvelle concentration.

«Par le rapide perfectionnement des instruments de production et l'amélioration infinie des moyens de communication, la bourgeoisie entraîne dans le courant de la civilisation jusqu'aux nations les plus barbares... Sous peine de mort, elle force toutes les nations à adopter le mode bourgeois de production... à introduire chez elles la prétendue civilisation. En un mot, elle se façonne un monde à son image».

Mais aujourd'hui les nations hier encore «barbares» qui ont rejeté la domination impérialiste et introduit chez elles le «mode bourgeois de production» et la «prétendue civilisation» se déclarent toutes plus ou moins «socialistes», de la Chine à l'Algérie, de la Guinée à Cuba. Bien mieux, «la rencontre des partis communistes occidentaux avec les représentants démocratiques du Tiers Monde», afin d'élaborer «une plate-forme concrète de coopération et d'aide» souhaitée par feu Togliatti est considérée par le «mouvement ouvrier» d'aujourd'hui non point comme une politique visant l'élargissement des bases du capitalisme et sa stabilisation. mais comme le nec plus ultra d'une politique «socialiste». Surtout, la Russie de 1964 regarde de haut la Russie «barbare» de l'époque révolutionnaire, se vante de pouvoir désormais rivaliser avec les USA pour le «perfectionnement des moyens de production», elle n'a rien fait d'autre qu' «introduire chez elle la prétendue civilisation» et se modeler à l'image du monde bourgeois !

«La société bourgeoise moderne, qui a fait surgir de si puissants moyens de production, contre le régime de propriété qui conditionne l'existence de la bourgeoisances infernales qu'il a évoquées. Depuis des dizaines d'années, l'histoire de l'industrie et du commerce n'est autre chose que l'histoire de la révolte des forces de production, contre le régime de propriété qui conditionne l'existence de la bourgeoisie et sa domination... Comment la bourgeoisie surmonte-t-elle ses crises? D'un côté, en détruisant par la violence une masse de forces productives, de l'autre en conquérant de nouveaux marchés et en exploitant plus rigoureusement les anciens. A quoi cela aboutit-il? A préparer des crises plus générales et plus formidables, et à diminuer les moyens de les prévenir».

Aujourd'hui, les guerres impérialistes passent dans le «mouvement ouvrier» non pas pour une manifestation de la «révolte des forces de production contre le régime qui conditionne la domination de la bourgeoisie», mais pour l'œuvre de «groupes monopolistes réactionnaires»; les crises «générales et formidables» sont exclues de la perspective d'avenir, l'expansion industrielle et le commerce sont vantés comme des facteurs de Progrès social et de paix... et les Chinois sont mis au ban parce qu'ils continuent à dire «que tant que le capitalisme survivra, les crises et les guerres resteront inévitables».

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Les principes du Manifeste et du courant marxiste dans la I° Internationale qui concernent la lutte du prolétariat n'ont pas reçu de meilleur traitement dans le «mouvement ouvrier» anti-internationaliste d'aujourd'hui que ceux qui concernent les caractéristiques et l'avenir du capitalisme.

«A mesure que grandit la bourgeoisie, c'est-à-dire le capital, se développe aussi le prolétariat, la classe des ouvriers modernes qui ne vivent qu'à la condition de trouver du travail et qui n'en trouvent que si leur travail accroît le capital (et) sont une marchandise, un article de commerce tout comme un autre... exposés par conséquent à toutes les vicissitudes de la concurrence, à toutes les fluctuations du marché». Aujourd'hui, les ouvriers sont présentés comme des citoyens à part entière, intéressés à l'expansion économique et au développement de la productivité, qui est pourtant le plus court chemin pour arriver à la situation où ils ne peuvent plus vivre parce que leur travail ne permettrait plus au Capital de s'accroître (voyez Sochaux, Jeumont, la Seyne, Paris, etc.)

«Le prix du travail, comme celui de toute autre marchandise, est égal à son coût de production. Donc plus le travail devient répugnant, plus le salaire baisse
Communistes et socialistes contemporains n'en déduisent pas la nécessité d'abolir le régime barbare qui fait du travail une marchandise, dont il évalue le prix selon les mêmes principes économiques que pour toute autre marchandise, comme il est fatal. Ils en déduisent la nécessité de petits instituts de «promotion du travail» où l'on apprend des travaux moins «répugnants» et payés plus cher

«Simples soldats de l'industrie, ils sont placés sous la surveillance d'une hiérarchie complète de sous-officiers et d'officiers (au sens industriel!). Ils ne sont pas seulement les esclaves de la classe bourgeoise, de l'Etat bourgeois, mais encore chaque jour, à chaque heure, les esclaves de la machine, du contremaître, et surtout du bourgeois fabricant lui-même»
(ajoutons ou de l'Entreprise anonyme!).«Plus le despotisme proclame ouvertement le profit comme son but unique, plus il devient mesquin, odieux, exaspérant». Pour ne pas paraître odieux et exaspérants, les «communistes» et «socialistes» contemporains qui cachent que les ouvriers sont non point de libres citoyens, mais des esclaves de l'État bourgeois ont un moyen bien simple: ils disent que le but unique est la prospérité et la grandeur nationale, l'abondance et le Progrès social!

Que «le résultat véritable de leurs luttes est moins le succès immédiat que l'union grandissante», que cette union ait essentiellement le mérite de «centraliser les nombreuses luttes locales... en une lutte de classe» qui est nécessairement «lutte politique» que «de toutes les classes qui, à l'heure présente, s'opposent à la bourgeoisie le prolétariat seul est révolutionnaire» tandis que les «classes moyennes sont non pas révolutionnaires, mais conservatrices et cherchent à faire tourner en arrière la roue de l'histoire» que «le travail industriel, l'asservissement de l'ouvrier au capital le dépouillement de tout caractère national», que «les lois, la morale, la religion sont à ses yeux autant de préjugés bourgeois derrière lesquels se cachent autant d'intérêts bourgeois»; que «les prolétaires n'ont rien à sauvegarder qui leur appartienne, mais à détruire toute garantie privée, toute sécurité privée antérieure» que le «prolétariat de chaque pays doit en finir avant tout avec sa propre bourgeoisie» que l'histoire de la société actuelle soit celle d'une «guerre civile plus ou moins larvée» qui la travaille jusqu'à l'heure «où cette guerre éclate en révolution ouverte, et où le prolétariat fonde sa domination par le renversement violent de la bourgeoisie», tout cela est dissimulé, nié, contesté de la première à la dernière ligne par des socialistes et communistes patriotes, ennemis (O Togliatti!) de toute lutte antireligieuse qui offenserait les catholiques, tout en étant des anticléricaux à éclipses, propagateurs de la morale expansionniste et productiviste, respectueux des lois de l'État et des bonnes constitutions, et par dessus tout ennemis de la violence!

Eux qui parlent constamment de «libertés démocratiques» menacées; de «démocratisation de la culture», de «respect des droits acquis», ils taisent que le Manifeste a proclamé que «Les idées bourgeoises de liberté, de culture, de droit résultent elles-mêmes du régime bourgeois de production» que «par liberté, dans les conditions actuelles de la production bourgeoise, on entend la liberté d'acheter et de vendre», mais que «tous les grands mots sur la liberté du commerce (O Khrouchtchev!) n'ont aucun sens lorsqu'il s'agit de l'abolition par le communisme, du trafic, du régime bourgeois de la production et de la bourgeoisie elle-même». Ils taisent que le droit «n'est que la volonté de la classe bourgeoise érigée en loi, volonté dont le contenu est déterminé par les conditions matérielles d'existence de cette classe».

Eux qui parlent (O Togliatti!) de dialogue, même avec des partis bourgeois «sur des problèmes d'intérêt commun afin d'intéresser toute l'opinion publique, ce qui exige que le débat soit mené avec des formes correctes, et non pas avec la vulgarité et la violence employées par les Albanais et les Chinois» (Testament !), ils ont depuis belle lurette renié le principe révolutionnaire cardinal des trois Internationales successives à leur époque révolutionnaire:

«La première étape dans la révolution ouvrière est la constitution du prolétariat en classe dominante...
Le prolétariat se servira de sa suprématie politique pour arracher petit à petit tout le Capital à la bourgeoisie...
Cela ne pourra naturellement se faire, au début, que par une violation despotique du droit de propriété et du régime bourgeois de production
».

Mais aujourd'hui, les «communistes» (et socialistes) rejettent loin d'eux avec horreur toute idée de «despotisme révolutionnaire», même historiquement passager, même limité à la période d'extirpation du capitalisme, à laquelle succédera «une association où le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous», parce que les classes antagoniques auront disparu.

Eux, ils sont pour «les formes correctes», «sans vulgarité», et «sans violence». Dans son Testament, le «grand Togliatti» franchissait même l'ultime limite qui séparait les «communistes» mêmes dégénérés des socialistes traditionnels en posant carrément la grande revendication de la trahison réformiste, révisionniste et démocratique:

«C'est ainsi que la question se pose de la possibilité pour les classes laborieuses de conquérir des positions de pouvoir dans les cadres d'un État qui n'a pas changé sa nature d'État bourgeois et de la possibilité de lutter pour une transformation progressive, de l'intérieur, de cette nature d'État bourgeois. Dans les pays où le mouvement communiste est aussi fort que chez nous, voilà la question fondamentale qui se pose aujourd'hui dans la lutte politique».

Cent ans après la fondation de la l' Internationale pour la victoire des principes du Manifeste on est passé dans le «mouvement ouvrier» officiel de la «suprématie politique du prolétariat» et de son despotisme révolutionnaire.. à la «transformation progressive, de l'intérieur, de cette nature de l'État bourgeois».

Cent ans après, toute la lutte est à recommencer comme à zéro pour la victoire des principes du marxisme révolutionnaire, sans laquelle il n'y aura pas de victoire de la Révolution communiste.

Eh bien camarades, recommençons !

Source: «programme communiste», N° 29, octobre-décembre 1964

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